Bonjour Guy, comment est née l’association les Bureaux du Cœur ?
L’association les Bureaux du Cœur a été initiée par le président du CJD de Nantes de l’époque, Pierre-Yves Loaëc. Il a rassemblé autour de lui quelques jeunes dirigeants qui ont incubé le projet pendant 15-16 mois. A la suite de quelques bêta-tests, les statuts de l’association ont été déposés. Puis, comme tout le monde, nous avons traversé la période du covid et l’association est effectivement opérationnelle depuis janvier 2021.Les Bureaux du Cœur, c’est quoi ?
C’est un inter-médiateur. Notre rôle est de mettre en relation des associations partenaires que nous avons choisies pour leur activité d’accompagnement et de réinsertion avec des entreprises qui se proposent d’accueillir dans leurs locaux une personne en grande difficulté pendant la nuit et le week-end de façon temporaire.Qui sont les personnes accueillies par ces entreprises ?
Ce sont les associations partenaires qui nous proposent des personnes à accueillir. Nous les appelons “les invités”. Nous tenons beaucoup à l’acception première de ce mot : quand on est un invité, on est accueilli et on ne doit rien en échange. Ces invités, donc, sont déjà dans un processus de réinsertion avancé et, ce qui leur manque souvent pour trouver facilement à s’insérer dans un environnement économique, c’est un chez soi, un espace qui leur est dédié, même s’il est temporaire. Le point commun entre tous ces invités est le fait que ce sont des personnes majeures, seules, sans addictions ni troubles psychiques et psychiatriques profonds.Et au niveau des entreprises, quels sont les critères pour devenir hôte ?
Dans les entreprises, nous nous assurons que tous les éléments logistiques sont au rendez-vous. Une salle de repos dans la journée peut faire office d’espace de vie le soir en y ajoutant un clic-clac et une armoire qui ferme à clé. Il faut également un espace kitchenette et des sanitaires disponibles, voire une douche. Nous regardons également les aspects sécuritaires, assurantiels et administratifs. Mais le plus important pour nous, c’est que toute l’équipe de l’entreprise soit investie dans le projet. Ce n’est pas du Airbnb social, c’est une équipe qui dit à une personne “On te donne ta chance”. Nous cherchons aussi à créer du lien et comme dans tous rapports humains nous avons souvent de belles surprises.
Combien de temps dure un accueil dans une entreprise ?
En général, l’accueil dure entre 3 et 6 mois et nous organisons des bilans d’étapes mensuels avec toutes les parties prenantes pour s’assurer que tout se passe bien.
Aujourd’hui, après une année d’expérimentation, nous avons 70 à 80 % des invités qui ont rebondi et gardent un lien avec les entreprises d’accueil.
L’humain est donc au cœur des préoccupations de l’association
Oui, notre rôle c’est de dire à cette personne que le temps pendant lequel elle sera accueillie dans notre structure hôte, elle sera reconnue, elle aura un lieu qui sera le sien et pour symboliser tout cela on organise une remise des clés avec toutes les équipes, autour d’un café ou d’un jus de fruit. Pour nous c’est comme cela que doit commencer un accueil. Toutes les relations humaines que nous allons tisser autour de cet invité, c’est effectivement ce qui fait battre le cœur de l’association. Et ce qui nous importe aussi c’est de montrer qu’une entreprise n’est pas seulement un lieu de contraintes et de chiffres, c’est aussi un lieu ouvert sur la réalité du monde et dans lequel on peut donner une chance à quelqu’un qui était dans une grande difficulté et sans toit.L’association les bureaux du cœur est implantée à Nantes, a-t-il été difficile de trouver les premières entreprises hôtes ?
Pas vraiment, les premières entreprises à accueillir des invités étaient des entreprises du CJD Nantes, cela nous a permis de modéliser notre projet associatif sur un périmètre nanto-nantais dans un premier temps. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Après seulement 1 an, nous sommes présents dans 22 villes supplémentaires.
Tout est donc allé très vite !
Oui, pendant le second confinement, Pierre-Yves Loaëc, par ailleurs dirigeant d’une agence de communication digitale, a appuyé sur tous les boutons et les médias ont suivi. A cette époque, les journalistes se demandaient ce qui se passait dans les entreprises pendant le confinement et cherchaient des bonnes nouvelles. Nous avons été relayés tout de suite par Télénantes mais aussi au niveau national par TF1, France 2, France 3, Canal Plus, BFM et aussi par la presse écrite. Il y a eu tellement de relais que tout à coup, des mains se sont levées un peu partout en France pour participer à cette aventure humaine.
Et côté associations dans ces nouvelles villes, il n’a pas été trop compliqué de les trouver ?
La difficulté, c’est de trouver des associations dont les missions et les publics concernés s’inscrivent parfaitement dans le modèle associatif des Bureaux du Cœur, des associations locales reconnues par les collectivités avec lesquelles nous pourrons nouer des relations pérennes. Nous sommes en recherche permanente.
Comment fonctionne l’association au quotidien ?
Nous avons nos bureaux dans les locaux de Cedreo à St Herblain, qui nous accueille avec bienveillance et courtoisie, ce qui nous permet d’avoir un lieu d’où coordonner les 80 bénévoles qui sont les relais dans toutes les villes. Suite à cet élan, l’idée est aujourd’hui d’investir dans une communication encore plus dynamique auprès des collectivités et d’organiser des événements, de participer à des groupes de travail, aux assemblées générales d’associations, de rencontrer les compagnies d’assurance pour porter notre message. A ce jour, les Bureaux du Cœur sont soutenus par le département de la Loire-Atlantique et par la Fondation de France, qui nous accompagne sur un programme de développement à 3 ans, d’autres soutiens sont en cours de négociation. L’un de nos objectifs actuels est de construire une équipe de permanents accompagnant notre développement en pérennisant l’association.L’association repose donc sur l’investissement de nombreux bénévoles, est-il encore possible de vous rejoindre ?
Chaque arrivée est une belle histoire, si une personne veut nous rejoindre, elle peut nous contacter via notre site internet, nous saurons l’orienter. Chaque bénévole reçoit une formation sur l’association et sa mission. Puis il est accompagné tout au long de son bénévolat. Si la personne est dans une ville où l’association est déjà présente, cela peut aller très vite. Si c’est dans une nouvelle ville, on regarde avec elle la nature de l’engagement qu’elle pourra nous donner pour, peut-être, être la personne pionnière, si c’est son souhait.
Nos bénévoles sur le terrain ont la grande chance d’être en contact avec l’invité de l’accueil au rebond, ils sont “au cœur" des Bureaux du Cœur et de la relation humaine. Remettre les clés et, dire à quelqu’un, qui n’avait plus de toit, “ça y est, tu es chez toi”, c’est un moment très fort.
Merci beaucoup Guy pour cet entretien très inspirant et plein d’espoir, y a t’il une dernière chose que tu souhaiterais ajouter ?
Oui, une dernière chose. Il y a 1 an, accueillir une personne en difficulté dans une entreprise était disruptif. J’espère qu‘avoir une pièce d’accueil deviendra vite la norme, comme d’avoir des douches sur son lieu de travail. Les Bureaux du Coeur ont pour vocation de tendre le plus de mains possibles et donner aux plus démunis la chance de vivre leur rêve. Grâce aux entreprises, à la volonté de leurs dirigeants, à l’enthousiasme des équipes : c’est possible. Certes la RSE nous aide à concrétiser les projets d’accueil, mais rien ne pourrait se faire sans la quête de sens et la solidarité qui animent tous ceux qui nous rejoignent et ceux qui accueillent. Vraiment, ce qui bat au cœur des Bureaux du Cœur, c’est “l’humain”.
La démarche des Bureaux du Coeur vous parle ? Vous souhaitez les soutenir voire vous impliquer ?
Que vous soyez chef d’entreprise, salarié ou tout simplement citoyen, n’hésitez pas à contacter l’association.